Zoltan Weider - Dans ton récent texte Aquarium, qui se veut autobiographique, tu écris en sous-titres: parenthèses et dévoilements. Pour ce qui est de parenthèses, on les voit, on les comprend, on en adopte facilement la convention. Mais comment définis-tu l’aspect dévoilements, au pluriel, dans le fonctionnement de ton texte?

 

Yannick Dubreuil - Au départ, ce devait une série de dévoilements, au propre comme au figuré, par une exposition de photos de moi tout habillé d’abord et allant vers des photos de mon corps nu, puis une plongée beaucoup plus descriptive de mon intimité. Malheureusement le choix de livrer mon inédit sur DH ne m’autorisait pas la nudité, sinon que suggestive, et ça m’a limité. Je voulais vraiment un dévoilement progressif de mon corps dévêtu, devant un œil aussi scrutateur que le serait le mien, devant un sosie de moi-même, accédant, à la fin de la rencontre, à une nudité frontale, et donc atteignant sa double nature provocante et vulnérable.

 

Z.W. -  Je crois que c’est ce qui ressort de ton texte malgré tout, bien que sans l’appui de l’image.

 

Y.D. - Ne serait-ce que par cette absence de dévoilements: tout reste virtuel, potentiel, donc à venir, mais perceptible. Je ne dis pas pour autant que je considère ce texte réussi. D’ailleurs on ne s’est pas gêné pour y relever ses faiblesses.

 

Z.W. - Ça t’a blessé?

 

Y.D. - Sur le coup, ça m’a assommé. J’ai senti une attaque personnelle d’autant plus virulente que je ne connaissais pas la personne. Mais le fait ensuite que Dominique ait pris ma défense m’a redonné mes moyens. Avec le recul, ce qui me fâche le plus est que voulant écorcher ma démarche la critique a un peu confondu les concepts de narcissisme, qu’elle invoque comme si c’était un comportement fautif, avec celui d’exhibitionnisme, qui aurait été plus juste. Aquarium est le texte d’un homme qui a tout simplement envie de se dénuder devant un témoin qui le réclame à mot couvert.

Z.W. - Ce témoin? C’est toi?

 

Y.D. - Moi, ou le préposé qui me ressemble physiquement au point de pouvoir se faire passer pour moi, ou moi pour lui, il faut le voir d’une manière ludique. C’est le vis-à-vis de l’instant présent. L’autre, tel qu’apparaissant en même temps que la pulsion de se dévêtir, d’être sans défense, sans ressort. Ce sont les yeux du moment présent. Des yeux miroirs qui ont tout du regard tel que l’on peut l’espérer, avec tous les attributs du regard désirant, ce qui inclut pas mal tout sauf le jugement.

 

Z.W. - Et qui dit désirant dit désirable?

 

Y.D. - Oui mais pas nécessairement. Un «désirable» accidentel, advenu dans la neutralité (un exhibitionniste cherche à se montrer pour la finalité de se montrer) peut renforcer la pulsion. À ce moment-là le désir d’être nu devant l’autre devient impérieux et peut nuire à une forme de rituel en douceur. Dans mon texte, le Yannick exhibitionniste rencontre le Yannick voyeur sans véritable désir de séduction, mais sans fermer aucune porte.

 

Z.W. - Et auquel des deux Yannick t’identifies-tu le plus?

 

Y.D. - Bonne question. D’un point de vue narratif, les parenthèses n’expriment aucun désir de voyeurisme. Dans le dialogue au premier degré, c’est l’inverse: les initiatives sont là pour encourager la pulsion exhibitionniste de dévoiler l’intimité. Forcément c’est le voyeur qui est propulsé au premier plan. C’est lui qui prend l’initiative du troisième Yannick, le visiteur.

 

Z.W. - Qui serait le témoin?

 

Y.D. - Le témoin, l’observateur.

 

Z.W. - Et la scène du bain?

 

Y.D. - Une synthèse. Accès à l’intimité (un homme dans son bain) mais non encore dévoilé (il a gardé ses vêtements) et donc sollicite l’obligation de les enlever (de se les faire enlever par le serviteur, ou même par le témoin) partant du principe que le serviteur ou le témoin n’auront pas, eux, à dévoiler leurs véritables intentions: jeux de regards amusés, ou intrigués, mais réaction naturaliste: rien n’est moins confortable que de se retrouver habillé dans l’eau. De cet inconfort naît la projection du confort de la nudité. C’est l’autre moi, dans sa fascination pour la nudité, qui me fera passer d’un état d’inconfort à un état de confort.

 

Z.W. - Donc tu t’es réellement mis dans le bain tout habillé?

 

Y.D. - Et je suis réellement rentré dans la chambre pour y découvrir un homme qui me ressemblait, en train de relaxer tout habillé dans son bain après n’avoir retiré que ses chaussures, comme dans le scénario établi à la réception.

 

Z.W. - Ça représente quoi pour toi au plan fantasmatique?

 

Y.D. - Un temps d'arrêt, un temps préalable. C’est le temps de fusion avant l’atteinte du moment de nudité absolue.

 

Z.W. - Attente / atteinte?

 

Y.D. - On est toujours dans l’attente d’une atteinte quand il s’agit d’intimité.

 

Zoltan Weider - Dans ton récent texte Aquarium, qui se veut autobiographique, tu écris en sous-titres: parenthèses et dévoilements. Pour ce qui est de parenthèses, on les voit, on les comprend, on en adopte facilement la convention. Mais comment définis-tu l’aspect dévoilements, au pluriel, dans le fonctionnement de ton texte?

 

Yannick Dubreuil - Au départ, ce devait une série de dévoilements, au propre comme au figuré, par une exposition de photos de moi tout habillé d’abord et allant vers des photos de mon corps nu, puis une plongée beaucoup plus descriptive de mon intimité. Malheureusement le choix de livrer mon inédit sur DH ne m’autorisait pas la nudité, sinon que suggestive, et ça m’a limité. Je voulais vraiment un dévoilement progressif de mon corps dévêtu, devant un œil aussi scrutateur que le serait le mien, devant un sosie de moi-même, accédant, à la fin de la rencontre, à une nudité frontale, et donc atteignant sa double nature provocante et vulnérable.

 

Z.W. -  Je crois que c’est ce qui ressort de ton texte malgré tout, bien que sans l’appui de l’image.

 

Y.D. - Ne serait-ce que par cette absence de dévoilements: tout reste virtuel, potentiel, donc à venir, mais perceptible. Je ne dis pas pour autant que je considère ce texte réussi. D’ailleurs on ne s’est pas gêné pour y relever ses faiblesses.

 

Z.W. - Ça t’a blessé?

 

Y.D. - Sur le coup, ça m’a assommé. J’ai senti une attaque personnelle d’autant plus virulente que je ne connaissais pas la personne. Mais le fait ensuite que Dominique ait pris ma défense m’a redonné mes moyens. Avec le recul, ce qui me fâche le plus est que voulant écorcher ma démarche la critique a un peu confondu les concepts de narcissisme, qu’elle invoque comme si c’était un comportement fautif, avec celui d’exhibitionnisme, qui aurait été plus juste. Aquarium est le texte d’un homme qui a tout simplement envie de se dénuder devant un témoin qui le réclame à mot couvert.

Z.W. - Ce témoin? C’est toi?

 

Y.D. - Moi, ou le préposé qui me ressemble physiquement au point de pouvoir se faire passer pour moi, ou moi pour lui, il faut le voir d’une manière ludique. C’est le vis-à-vis de l’instant présent. L’autre, tel qu’apparaissant en même temps que la pulsion de se dévêtir, d’être sans défense, sans ressort. Ce sont les yeux du moment présent. Des yeux miroirs qui ont tout du regard tel que l’on peut l’espérer, avec tous les attributs du regard désirant, ce qui inclut pas mal tout sauf le jugement.

 

Z.W. - Et qui dit désirant dit désirable?

 

Y.D. - Oui mais pas nécessairement. Un «désirable» accidentel, advenu dans la neutralité (un exhibitionniste cherche à se montrer pour la finalité de se montrer) peut renforcer la pulsion. À ce moment-là le désir d’être nu devant l’autre devient impérieux et peut nuire à une forme de rituel en douceur. Dans mon texte, le Yannick exhibitionniste rencontre le Yannick voyeur sans véritable désir de séduction, mais sans fermer aucune porte.

 

Z.W. - Et auquel des deux Yannick t’identifies-tu le plus?

 

Y.D. - Bonne question. D’un point de vue narratif, les parenthèses n’expriment aucun désir de voyeurisme. Dans le dialogue au premier degré, c’est l’inverse: les initiatives sont là pour encourager la pulsion exhibitionniste de dévoiler l’intimité. Forcément c’est le voyeur qui est propulsé au premier plan. C’est lui qui prend l’initiative du troisième Yannick, le visiteur.

 

Z.W. - Qui serait le témoin?

 

Y.D. - Le témoin, l’observateur.

 

Z.W. - Et la scène du bain?

 

Y.D. - Une synthèse. Accès à l’intimité (un homme dans son bain) mais non encore dévoilé (il a gardé ses vêtements) et donc sollicite l’obligation de les enlever (de se les faire enlever par le serviteur, ou même par le témoin) partant du principe que le serviteur ou le témoin n’auront pas, eux, à dévoiler leurs véritables intentions: jeux de regards amusés, ou intrigués, mais réaction naturaliste: rien n’est moins confortable que de se retrouver habillé dans l’eau. De cet inconfort naît la projection du confort de la nudité. C’est l’autre moi, dans sa fascination pour la nudité, qui me fera passer d’un état d’inconfort à un état de confort.

 

Z.W. - Donc tu t’es réellement mis dans le bain tout habillé?

 

Y.D. - Et je suis réellement rentré dans la chambre pour y découvrir un homme qui me ressemblait, en train de relaxer tout habillé dans son bain après n’avoir retiré que ses chaussures, comme dans le scénario établi à la réception.

 

Z.W. - Ça représente quoi pour toi au plan fantasmatique?

 

Y.D. - Un temps d'arrêt, un temps préalable. C’est le temps de fusion avant l’atteinte du moment de nudité absolue.

 

Z.W. - Attente / atteinte?

 

Y.D. - On est toujours dans l’attente d’une atteinte quand il s’agit d’intimité.

 

Zoltan Weider - Dans ton récent texte Aquarium, qui se veut autobiographique, tu écris en sous-titres: parenthèses et dévoilements. Pour ce qui est de parenthèses, on les voit, on les comprend, on en adopte facilement la convention. Mais comment définis-tu l’aspect dévoilements, au pluriel, dans le fonctionnement de ton texte?

 

Yannick Dubreuil - Au départ, ce devait une série de dévoilements, au propre comme au figuré, par une exposition de photos de moi tout habillé d’abord et allant vers des photos de mon corps nu, puis une plongée beaucoup plus descriptive de mon intimité. Malheureusement le choix de livrer mon inédit sur DH ne m’autorisait pas la nudité, sinon que suggestive, et ça m’a limité. Je voulais vraiment un dévoilement progressif de mon corps dévêtu, devant un œil aussi scrutateur que le serait le mien, devant un sosie de moi-même, accédant, à la fin de la rencontre, à une nudité frontale, et donc atteignant sa double nature provocante et vulnérable.

 

Z.W. -  Je crois que c’est ce qui ressort de ton texte malgré tout, bien que sans l’appui de l’image.

 

Y.D. - Ne serait-ce que par cette absence de dévoilements: tout reste virtuel, potentiel, donc à venir, mais perceptible. Je ne dis pas pour autant que je considère ce texte réussi. D’ailleurs on ne s’est pas gêné pour y relever ses faiblesses.

 

Z.W. - Ça t’a blessé?

 

Y.D. - Sur le coup, ça m’a assommé. J’ai senti une attaque personnelle d’autant plus virulente que je ne connaissais pas la personne. Mais le fait ensuite que Dominique ait pris ma défense m’a redonné mes moyens. Avec le recul, ce qui me fâche le plus est que voulant écorcher ma démarche la critique a un peu confondu les concepts de narcissisme, qu’elle invoque comme si c’était un comportement fautif, avec celui d’exhibitionnisme, qui aurait été plus juste. Aquarium est le texte d’un homme qui a tout simplement envie de se dénuder devant un témoin qui le réclame à mot couvert.

Z.W. - Ce témoin? C’est toi?

 

Y.D. - Moi, ou le préposé qui me ressemble physiquement au point de pouvoir se faire passer pour moi, ou moi pour lui, il faut le voir d’une manière ludique. C’est le vis-à-vis de l’instant présent. L’autre, tel qu’apparaissant en même temps que la pulsion de se dévêtir, d’être sans défense, sans ressort. Ce sont les yeux du moment présent. Des yeux miroirs qui ont tout du regard tel que l’on peut l’espérer, avec tous les attributs du regard désirant, ce qui inclut pas mal tout sauf le jugement.

 

Z.W. - Et qui dit désirant dit désirable?

 

Y.D. - Oui mais pas nécessairement. Un «désirable» accidentel, advenu dans la neutralité (un exhibitionniste cherche à se montrer pour la finalité de se montrer) peut renforcer la pulsion. À ce moment-là le désir d’être nu devant l’autre devient impérieux et peut nuire à une forme de rituel en douceur. Dans mon texte, le Yannick exhibitionniste rencontre le Yannick voyeur sans véritable désir de séduction, mais sans fermer aucune porte.

 

Z.W. - Et auquel des deux Yannick t’identifies-tu le plus?

 

Y.D. - Bonne question. D’un point de vue narratif, les parenthèses n’expriment aucun désir de voyeurisme. Dans le dialogue au premier degré, c’est l’inverse: les initiatives sont là pour encourager la pulsion exhibitionniste de dévoiler l’intimité. Forcément c’est le voyeur qui est propulsé au premier plan. C’est lui qui prend l’initiative du troisième Yannick, le visiteur.

 

Z.W. - Qui serait le témoin?

 

Y.D. - Le témoin, l’observateur.

 

Z.W. - Et la scène du bain?

 

Y.D. - Une synthèse. Accès à l’intimité (un homme dans son bain) mais non encore dévoilé (il a gardé ses vêtements) et donc sollicite l’obligation de les enlever (de se les faire enlever par le serviteur, ou même par le témoin) partant du principe que le serviteur ou le témoin n’auront pas, eux, à dévoiler leurs véritables intentions: jeux de regards amusés, ou intrigués, mais réaction naturaliste: rien n’est moins confortable que de se retrouver habillé dans l’eau. De cet inconfort naît la projection du confort de la nudité. C’est l’autre moi, dans sa fascination pour la nudité, qui me fera passer d’un état d’inconfort à un état de confort.

 

Z.W. - Donc tu t’es réellement mis dans le bain tout habillé?

 

Y.D. - Et je suis réellement rentré dans la chambre pour y découvrir un homme qui me ressemblait, en train de relaxer tout habillé dans son bain après n’avoir retiré que ses chaussures, comme dans le scénario établi à la réception.

 

Z.W. - Ça représente quoi pour toi au plan fantasmatique?

 

Y.D. - Un temps d'arrêt, un temps préalable. C’est le temps de fusion avant l’atteinte du moment de nudité absolue.

 

Z.W. - Attente / atteinte?

 

Y.D. - On est toujours dans l’attente d’une atteinte quand il s’agit d’intimité.